Restauration de 3 bassins versants d'alimentation en eau potable

OBJECTIFS

La commune de Houailou comporte 33 tribus et deux villages, alimentés en eau potable par 14 captages d’eau de surface. Les écosystèmes forestiers couvrant leurs bassins versants régulent la qualité et la disponibilité de la ressource en eau.

Identifiés comme sites prioritaires de restauration, trois de ces bassins versants sont dégradés, la forêt ayant été partiellement remplacée par une savane éventuellement envahie de Pinus caribea invasif. Le couvert forestier a entièrement disparu de certaines surfaces, notamment à cause des feux, et sa régénération est inhibée par la présence de cerfs et cochons sauvages, qui constituent par ailleurs une menace sanitaire.

L’érosion résultant de cette déforestation est à l’origine d’apports terrigènes dans la rivière en aval, et de signes d’instabilité du sol sur ces pans déboisés vulnérables aux glissements de terrain.

Un engin de chantier, tombé en contrebas d’un captage, constitue depuis une dizaine d’années une source de pollution susceptible d’affecter la faune et la flore aquatique.

Pour réguler sur le long terme la quantité et la qualité de la ressource en eau potable, réduire les risques d’engravement et de mouvement de terrain liés à l’érosion, et reconquérir la biodiversité terrestre et aquatique de 3 bassins versants AEP prioritaires, la commune de Houailou y a entrepris un chantier restauration des écosystèmes forestiers.

MESURES MISES EN ŒUVRE

Les 3 chantiers (Néwa, Ouakaya et Karovin) se décomposent en 7 volets d’intervention, majoritairement mis en œuvre par des associations des tribus concernées, pour le bénéfice direct et indirect de la population locale :

1. L’état initial des sites prioritaires d’intervention a été évalué par un botaniste. La zone prioritaire de restauration (le PPR : Périmètre de Protection Rapproché) a été délimitée, couvrant 5 à 10 ha en amont immédiat des captages. 9000 plants d’une vingtaine d’espèces endémiques ou natives, adaptées à la reforestation des sites concernés et à la restauration d’habitat pour la faune endémique locale, ont été recommandés par le botaniste et mis en production.
2. A Ouakaya, les pins envahissants, de toute taille, ont été abattus ou arrachés et laissés au sol pour l’enrichir en matière organique.
3. Les PPR ont été mis en défense par une clôture excluant les cerfs et cochons sauvages, pour favoriser la régénération naturelle et limiter les risques sanitaires en amont immédiat du captage. Le chantier de Néwa a notamment bénéficié d’une aide temporaire fournie par une troupe de militaires du RIMAP pour l’acheminement des poteaux, piquets et rouleaux de grillage sur les hauteurs.
4. Un plan de régulation des cerfs et cochons sauvages envahissants a été mis en œuvre sur l’ensemble des bassins versants de Néwa et Karovin (environ 1000 ha), sous la supervision de la FFCNC, en battues participatives et chasse à l’approche par des chasseurs locaux semi-professionnalisés.
5. La pelleteuse tombée dans le cours d’eau en contrebas du captage de Néwa a été démantelée et évacuée vers une structure de traitement des carcasses.
6. Les zones mises en défens ont été reboisées : les 9000 plants produits suivant les recommandations du botaniste ont été mis en terre en mélangeant les espèces, suivant un alignement adapté au relief naturel du terrain. Pour optimiser les chances de survie, les plantations ont eu lieu durant la saison des pluies, et chaque plant a bénéficié d’un apport de gel hydro-rétenteur riche en nutriments essentiels, et d’un paillage en fibre de coco aux propriétés antifongiques naturelles.
7. En complément d’une communication régulière, un panneau d’information présentant les opérations réalisées et sensibilisant au respect de l’environnement a été installé dans les tribus. Des sculpteurs locaux ont réalisé des poteaux d’ornement, disposés de part et d’autre des panneaux pour favoriser la protection coutumière et spirituelle du site.

RÉSULTATS / IMPACTS POUR LA BIODIVERSITE

Les effets de cette opération sur la biodiversité et les services écosystémiques seront mesurables à moyen terme, lorsque la croissance des plants mis en terre et la régulation des ongulés envahissants aura permis de restaurer un couvert forestier dans les bassins versants. Ces effets concernent :

• La flore endémique, avec un gain net de biodiversité permis par la reconversion de savane en forêt. Le couvert forestier formé par la vingtaine d’espèces pionnières doit apporter l’ombrage nécessaire à la régénération et à la croissance des espèces sciaphiles, dispersées à partir des fragments forestiers à proximité ;
• La dynamique de régénération forestière rétablie et maintenue sur le long terme grâce à la régulation des ongulés envahissants au sein du bassin versant. Jusqu’alors le sous-bois était détruit par la consommation, le piétinement, l’écorçage et les fouilles des cerfs et des cochons ;
• La faune terrestre endémique protégée, avec la restauration d’un habitat source de refuges et de ressources alimentaires notamment pour les roussettes, dont une population est établie à proximité immédiate du captage de Néwa, ainsi que pour différentes espèces d'oiseaux et de lézards (scinques et geckos) ;
• La faune aquatique, grâce à l’amélioration de la qualité de l’eau et l’élimination de la pelleteuse qui obstruait partiellement le cours d’eau ;
• Les services écosystémiques, notamment les processus de régulation de l’eau, des sols, de l’érosion, et des risques naturels.