Préservation génétique des prairies locales, récolte de graines par brossage

Objectifs :

La Charente qui traverse la ville induit un vaste réseau écologique où la prairie constitue une composante essentielle du paysage. Les bords de fleuve sont ainsi caractérisés par de grandes plaines inondables d'une très forte richesse floristique. Dans les franges de ses grands espaces naturels, les prairies mésophiles dominent et les quelques anticlinaux sont quant-à-eux principalement constitués de prairies sèches à tendance calcicole.

Dans le cadre de ses projets de renaturation, les services de la commune étaient d'une part confrontés à un manque de transparence quant à la traçabilité des graines fournies par les grands grainetiers industriels et, d'autres part, disposaient de terre végétale de provenance assez floue souvent porteuse de plantes exogènes.

Afin de limiter la pollution génétique des espaces de nature par des essences végétales non-indigènes et favoriser la dissémination d’une flore spontanée issue de son territoire, la ville de Saintes a établi un partenariat étroit avec le CEN-NA dans le cadre du dispositif PICTAGRAINE. Ce processus de récolte fonctionne par brossage des plantes sans couper l’herbe et en protégeant les insectes. Ainsi, en brossant et en semant de la graine issue de ses propres prairies, la ville de Saintes participe activement à la préservation génétique de sa flore locale et à la biodiversité faunistique qui lui est associée.

Mesures mises en œuvre :

Au travers de ses grands chantiers de renaturation (carrières, franges routières…), le CEN est souvent en recherche d’espaces prairiaux, de milieux différents, afin de pouvoir constituer son stock de graines. De son côté la ville de Saintes dispose d’un vaste patrimoine agricole, souvent géré en fauches tardives, permettant donc le passage de la brosseuse à la bonne saison. Il s’agit donc d’un partenariat à bénéfice réciproque qui permet par ailleurs au service espaces verts d’avoir accès à des graines locales, récoltées sur sa propre commune.

Le brossage en lui-même est défini par un protocole assez simple et se décompose de la manière suivante :

1. Diagnostic de la parcelle préalablement identifiée. Elle doit être suffisamment grande pour permettre le passage du tracteur et ne pas présenter d’obstacles (arbres, fossés…) et présenter une flore riche et caractéristique du milieu attendu. Un inventaire floristique est par conséquent réalisé par le CEN.
2. Suivi de l’état de maturité des plantes en fonction de la météo du printemps et de l’été et définition de la date de brossage, souvent à la fin du mois de juillet.
3. Brossage : 1 à 2 journées
4. Séchage des graines, identification et triage
5. Mise en sac et stockage

> Un inventaire botanique est réalisé par le CEN en amont du brossage et une identification des graines est également effectuée lors de la mise en sac. Cela permet une bonne connaissance tant des espèces semées que de leur provenance.

> Dans le cas d’un semis de renaturation, un inventaire d’état des lieux de la parcelle est pratiqué. Il sera comparé à celui réalisé lors du premier cycle de végétation suivant le semis et permettra de quantifier le degré de réussite de l’ensemencement.

> Des repasses d'inventaires seront à prévoir tous les ans ou tous les deux ans afin de confirmer ou d’infirmer l’implantation durable du cortège floristique local.

> Selon les objectifs du semis, le mélange peut occasionnellement être enrichi par des fleurs messicoles amenant des touches de couleurs ; elles sont auquel cas estampillées "Végétal Local" (Semences Nature ou Fleurs de la Clairière).

Résultats / impact pour la biodiversité :

En sa deuxième année de brossage, les mélanges prairiaux obtenus sont stockés et classifiés en fonction des milieux à requalifier (prairies humides, mésophiles, coteaux calcaires…)

Un axe d'amélioration est toutefois à prendre en compte dans les années futures : selon les milieux et les conditions météo de la saison, les graminées n’atteignent pas un seuil de maturité au même moment. Il serait donc nécessaire de pouvoir brosser les prairies en programmant les interventions en fonction des fenaisons. Or, principalement pour des raisons budgétaires et de disponibilité des intervenants, la prestation est à ce jour réalisée sur une à deux journées limitant de ce fait la totale efficience de la récolte selon les années.

Lors de la mise en place des inventaires naturalistes émanent de l'Atlas de la Biodiversité Communal, une attention particulière sera portée sur les zones ayant bénéficiées d'un semis issu du brossage et permettra d'évaluer plus spécifiquement l'état de la biodiversité.

Les inventaires botaniques réalisés lors des sélections parcellaires permettent, au-delà de leur intérêt pratique pour l'action de brossage, d'élaborer une analyse phyto-sociologique mettant en lumière l'impact insidieux du réchauffement climatique dans les cortèges floristiques. Les inventaires plus poussés lancés cette année dans le cadre du monitoring naturaliste apporteront de nouveaux éléments, particulièrement lors des études sur les insectes.